Ex Nihilo (Kat)

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Ex Nihilo
Tu me manques tellement...

Ca faisait déjà un moment qu'il se trouvait devant le café. Enfin, pas loin dans la rue, le fixant du regard, comme un psychopathe guettant sa proie. Clairement, il avait merdé. Non seulement, il avait merdé dans leur relation mais même après, à croire que c'était de pire en pire ! Chaque fois, il en rajoutait une couche ! Chaque fois, elle ne faisait que le fuir davantage. Cette relation semblait vouée à l'échec. Enfin, elle semblait plutôt terminée, emballée, rangée au milieu des vestiges du passé. Sauf que... Il était incapable de passer à autre chose. Depuis, ce jour, ce coup de trop, il était figé, bloqué dans sa vie, incapable d'avancer. Et la seule idée à laquelle il s'accrochait était celle de la retrouver, de la récupérer. Mais leurs retrouvailles avaient été une catastrophe... Ce qui le retenait de se foutre en l'air ? Elle. Chaque fois au moment de passer à l'acte, il voyait son visage devant ses yeux et un dernier espoir vague et fou, comme ultime sursaut de survie pourtant, venait le retenir.

L'autre jour malgré tout, la fin de l'histoire avait failli sonner pour de bon. Il roulait trop vite, bourré, sous médocs, il avait percuté une voiture de plein fouet et s'il s'en sortait si bien, c'était un vrai miracle. Vu la violence et la gravité de l'impact, il aurait du être mort, bien amoché ou en prison pour avoir mis la vie d'une femme (encore) en danger... enfin, ça c'était encore possible à vrai dire. Trop tôt pour connaître la sanction. Fallait-il qu'il tue vraiment quelqu'un pour qu'enfin on l'enferme ? Au lieu de ça, il était juste endolori de partout, un coude un peu raide, avec quelques égratignures ci et là, surtout au visage, sur les mains, à cause du pare-brise qui avait explosé, pas mal d'hématomes sur le corps mais rien de cassé. Evidemment, plus de permis par contre. Passage au poste et compagnie. Bah, ça avait l'avantage d'occuper ses journées... Il n'allait plus au garage, officiellement en arrêt maladie. Pourtant il avait une bonne santé vu le régime qu'il s'infligeait depuis des mois maintenant. Invincible. C'est pas juste, hein ? Enfin... il avait quand même des allures de fantôme. De fantôme alcoolique.

Il fixait le bar donc. De temps en temps, il arrivait à l'apercevoir. Planté, immobile, il fumait au point d'en avoir la gorge irritée. Malgré l'accident, il était allé à l'entraînement de boxe et ça c'était mal passé. Bientôt, il s'en ferait virer aussi. Pourtant, il en avait besoin. Il ne devait plus savoir quoi inventer pour se faire du mal, comme se torturer en l'imaginant avec ce connard de la saint valentin. Ce soir, il n'avait pas encore trop bu. Assommé par les médocs, il avait dormi une bonne partie de la journée. Pourquoi se pointait-il aujourd'hui spécialement ? Est-ce l'accident qui l'avait fait réfléchir ? Le temps écoulé qui lui semblait suffisant pour tenter une nouvelle approche ? Un autre événement encore, plus imprévu ? Il ne tremblait pas. Pourtant, il était impassible. Et étrangement calme. Presque distant. Oui, distant, éteint, déconnecté. Peut être qu'il avait eu besoin de rester longuement, comme ça, immobile et distant, avant de pouvoir, d'un seul coup, sans vraiment en prendre conscience, se déraciner et traverser la rue pour pousser la porte du café et dans ce même élan, se frayer doucement et modestement un chemin jusqu'à un siège du bar. Ce mouvement l'avait presque réchauffé mais il restait posé. Il ne la fixe pas. Il ne la regarde pas. Il a besoin d'un verre. Alors il demande, comme partout ailleurs, avec un bref regard. Comme si ce n'était pas elle. A un détail prêt... Il commande une boisson sans alcool. Détail qui a son importance. Pas d'alcool, c'était comme une façon à lui de présenter patte blanche. Drapeau blanc, il n'était pas venu pour faire un scandale. Encore fallait-il qu'elle l'accepte. Silencieux, il attend la réponse à cette question indirecte.

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And the arms of the ocean are carrying me, and all this devotion was rushing over (out of) me, and the crashes are heaven, for a sinner like me, but the arms of the ocean deliver me.

Ça fait des semaines qu’elle tente de retrouver le courage de sortir, de reprendre sa vie en main. Elle attendait. Elle attendait de ne plus avoir les marques pour souiller sa peau. Les marques qu’elle détestait regarder.
Le premier soir où elle reprendre réellement le travail. Elle a du mal à reprendre le rythme, mais le sourire revient un peu sur ses traits, passer sur son visage. Les verres qu’elle range. Elle aime bien jouer à la serveuse, malgré qu’elle se doit de passer du temps dans le bureau puisque les papiers s’accumulent depuis un moment. Elle n’est pas serveuse, mais elle aime le contact humain et pour ce soir, ça empêche la demoiselle de penser à ce qui la ronge. Ça empêche la blonde de ne se concentrer que sur ses maux.

Katya, elle retourne s’enfermer dans son bureau pour régler quelques problèmes. Les heures qui passent. Le temps qui file. Elle n’a pas envie de rentrer. Parce qu’elle a du mal à dormir seule, elle a du mal à se faire à sa vie de célibataire. Son manteau qu’elle attrape entre ses doigts et elle s’extirpe de son bureau. Elle ne peut pas rester ici toute la nuit, elle vient pratiquement d’y passer la journée et il n’est pas loin d’être une heure du matin.
Elle sort. Elle sort, mais son regard se porte sur lui. Cette impression qu’on lui enfonce un couteau au beau milieu du ventre. Leur dernière rencontre n’a franchement pas été un succès et c’est Jesse qui a écopé d’un coup au visage. Une façon de lui montre que ça ne mènera à rien. Elle ne sait pas. Elle ne lui fait plus confiance. Encore moins après ça. Elle s’en était terriblement voulu pour le coup. Qu’importe. Un pas en arrière. Le manteau qu’elle repose dans son bureau. Ça aurait été plus simple de fuir, mais ce n’est pas ce qu’elle fait.

Elle se glisse derrière le bar terriblement silencieuse, elle jette un regard à ce que la serveuse est en train de préparer. Un verre sans alcool. Katya, elle ne sait jamais comment se sentir lorsqu’il est dans les parages. Elle a envie de crier, de lui dire qu’il aurait pu agir autrement et penser avec autre chose que ses poings. Elle passe pourtant trop de temps à le défendre et à lui en vouloir. À se dire qu’il ne connaît rien d’autre que la rage et les coups.
Elle s’approche finalement.
Elle s’approche pour se poser en face de lui, sans contourner le bar pour se poser à côté. Elle n’a pas envie de proximité, ça lui fait trop peur. Surtout avec lui. Surtout depuis cette histoire et ce qu’elle a pu voir la dernière fois.
Son regard se pose sur les quelques marques sur son visage. Son cœur qui s’emporte. Elle n’aime pas le voir de la sorte. Elle n’aime pas le voir mal en point, c’est plus fort qu’elle. « Qu’est-ce qui est arrivé Trent?»
Elle ne cesse d’entendre qu’elle ne devrait même pas lui adresser la parole. Elle sait ce qu’elle fait. Elle sait ce qu’elle veut faire. Elle n’a pas envie de l’abandonner comme un déchet, surtout qu’elle est la seule à savoir réellement les maux de son âme.
Elle attrape le verre de la serveuse et le fait glisser vers lui.

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Tu me manques tellement...

Tout va bien, tout est sous contrôle. C'est ce qu'il se répète alors qu'il sait, qu'il sent... Elle s'approche. Il se concentre sur l'air qui entre et sort régulièrement de son corps. Il ne bouge pas, ne lève pas la tête du comptoir. Il attend, sagement, posément. La réponse est positive. Elle le rejoint. Elle est en face de lui, de l'autre côté du bar. Il n'ose poser un regard franc sur elle de peur que ça ne la fasse fuir. Il reste prudent. Il retient un soupir de soulagement mais n'est pas soulagé pour autant. Doucement, il lève le regard alors qu'elle glisse son verre vers lui. Le résultat est peu attrayant. Pourquoi il a voulu du sans alcool déjà ? Ah oui. Elle voit les blessures sur son visage, il avait presque oublié ce détail. Il n'était pas venu pour parler de ça. Ni pour lui faire du chantage affectif. Encore moins pour lui dire que la prochaine fois, il prendrait le virage volontairement et ne se raterait pas. Mais de quoi voulait-il parler au juste ? Il s'était pourtant préparé longuement en attendant dehors. Voilà qu'aucun mot ne semblait plus pouvoir franchir la frontière de ses lèvres. Il saisit le verre, après qu'elle l'ait lâché, et s'y accrocha sans y tremper ses lèvres. Il s'y accrocha comme on s'accroche à une bouée de sauvetage. Ces derniers temps, les verres du bar avaient beaucoup eu cette fonction pour lui. Mais ici, c'était pas pareil. Ici, c'était le bar de Kat. Alors qu'il le maintenait pourtant toujours, le verre semblait se dérober sous ses doigts, comme s'il était mou, comme si le liquide se mélangeait directement à sa main.

Il était calme. Il restait calme. Il n'était pas venu pour faire un scandale. Pas venu pour lui faire des reproches. Tout était sous contrôle. Alors pourquoi ? Pour des excuses ? Elle ne pourrait pas les accepter, elle le lui avait déjà dit. Alors pourquoi ? Oui, apparemment, c'était tout aussi dur à dire. Il la regarda rapidement, juste pour lui glisser quelques mots en guise de réponse, sans sourire, sans que son visage ne s'éclaire ou ne se déride. Avec ce même air impassible, éteint, inexpressif. Contrôle.

- Salut... Merci.

Kat, elle a toujours voulu avoir des réponses à ses questions. Elle n'aime pas quand on évite juste soigneusement le sujet alors il lui répond. Il avait toujours aimé la vitesse, elle l'avait même souvent mis en garde, elle ne l'ignorait donc pas et devait bien se douter que ce n'était pas maintenant qu'il allait se retenir. Au contraire.

- C'est rien. Un accident. Tu vois, maintenant, je casse les voitures au lieu de les réparer.

Il tente d'en parler avec légèreté pour ne pas insister sur le sujet. Ce n'était pas rien, il avait juste eu de la chance, même s'il risquait bel et bien d'avoir des ennuis. Il n'avait pas envie de lui dire. Bien sûr qu'il avait consommé de l'alcool avant l'accident, bien sûr qu'il n'était pas en état légal de conduire. Mais ce qu'il n'avait surtout pas envie de lui dire c'est que pour la seconde fois, il avait failli tuer une femme... Qu'encore une fois, il avait même vraiment cru l'avoir fait.

- Il y a eu du monde ce soir. Les affaires marchent. C'est bien.

Il tente de ne pas avoir l'air de le lui reprocher. De ne pas avoir l'air de penser que tout semble aller mieux pour elle, contrairement à lui. Il tente de rester neutre, il tente juste de la féliciter, il tente d'être content pour elle. Il essaye. Il fait son possible pour que cette fois, ça se passe mieux.

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- Salut... Merci. Le verre. Elle le laisse se poser devant lui. Normalement, elle devrait partir, mais comme c’est la première journée où elle trouve le courage de retourner travailler, elle a trop de choses à rattraper.
Ça lui fait mal de le voir là. Ça lui fait mal à chaque fois qu’elle pose son regard sur lui parce que plus le temps file, plus elle se souvient de ce soir-là. Elle lui en veut, mais elle n’arrive pas à le détester complètement. Elle se sent comme les femmes battues qui n’arrivent pas à en vouloir à leur tortionnaire. Elle le connaît trop. Elle sait que ce n’est pas ce qu’il a voulu faire, mais elle n’arrive pas à lui pardonner, parce qu’elle a trop peur.

- C'est rien. Un accident. Tu vois, maintenant, je casse les voitures au lieu de les réparer. Son cœur se serre alors qu’elle fait un pas en direction de lui, elle reste face à lui, derrière le comptoir qui les séparent. Leur dernière rencontre n’a pas été des plus douce et elle a du s’occuper de Jesse après le coup qu’il lui a balancé au visage. Jesse. Jesse. Elle n’a pas la moindre idée de comment se sentir lorsqu’elle est avec lui et elle ne se sent pas prête à rien. Katya, elle se sent handicapée des sentiments depuis la fin de leur histoire. Elle ne pourra pas avancer tant qu’elle se bernera à vouloir l’aider. Ça ne l’aide pas. Ça le berce d’illusions. Parce que oui, elle l’aime encore, mais elle ne pense pas qu’elle puisse lui faire confiance à nouveau. C’est trop demandé.
Ça n’empêche pourtant pas la jeune femme de s’inquiéter, de sentir son palpitant s’emporte lorsqu’elle remarque les blessures sur sa peau à lui. Elle serre un peu les dents et s’approche pour prendre appui sur le comptoir en face de lui. Elle laisse son regard passer sur ses traits, elle analyse les blessures et soupire doucement. Elle ne sait pas s’il dit la vérité, mais il ne lui doit rien. Il est libre de faire comme bon lui semble et c’est sûrement préférable qu’elle ne sache pas ce qu’il a pu faire. « Vraiment...» Un silence. « J'espère que tu n'as rien eu de grave.»

- Il y a eu du monde ce soir. Les affaires marchent. C'est bien. Katya hausse doucement les épaules. Elle ne sait pas ce qu’il fait là, mais elle ne se sent pas réellement à l’aise. La blonde, elle n’arrive pas à se détacher de lui complètement parce qu’elle sait qu’il a besoin d’aide. Elle a envie de lui donner cette chance, comme elle a envie de lui dire de ne plus s’approcher d’elle. Elle a peur. Elle a peur de la réaction que pourrait avoir sa sœur si elle le voyait ici. Tant pis. « Ca a fini par porter fruit.» Ses lèvres qui s’étirent en un léger sourire alors qu’elle se sert un verre. Elle a besoin de boire quelque chose, parce que ça se percute dans le fond de son crâne. Parce qu’elle ne sait pas quoi faire. Parce qu’elle ne sait pas quoi faire. « Heureusement que ma sœur n’est pas là ce soir. Je doute qu’elle aimerait te voir traîner ici.» Elle ne sait plus de quoi parler Katya et c’est la première chose qui lui vient en tête. C’est vrai. Mais ça n’a pas d’importance. La blonde, elle n’arrive pas à se défaire complètement de lui. C’est sûrement ça le pire.
« Je suis désolé.» Elle sait que ce n’est pas la meilleure chose à dire pour calmer l’atmosphère, mais elle ne sait plus quoi dire à force de confrontation. C’est trop de tension quand elle se trouve en face de lui. « Tu ne venais pas vraiment me voir ici. Qu’est-ce qui me vaut ta visite Trent?» Elle vacille entre trop de choses lorsqu’il est là. Elle ne sait plus sur quel pied danser.

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Tu me manques tellement...

Elle n'a pas l'air convaincue. Il lève un nouveau regard vers elle alors qu'elle se reprend et semble finalement accepter de se contenter de cette réponse. Il décrispe un peu la mâchoire et tourne doucement le verre entre ses doigts, sans toujours l'apporter à ses lèvres. La fille de la voiture n'était pas morte, elle s'en était sortie, elle allait bien. Voilà ce qu'il se répétait maintenant en plus du reste. Cela dit, cette fille était bien plus facile à oublier que Kat... Rien ne pourrait se comparer à ce qu'il avait ressenti lorsque c'est elle qu'il avait tué de ses propres mains... Alors oui, cet accident de voiture, au fond, c'était pas bien grave. Il arrivait encore à le croire. Même les conséquences potentielles n'étaient pas ce qui le hantait le plus, ni ce qui l'empêchait de dormir. Tout ça, c'était juste du plus, comme une accumulation de déchets qui viennent pourrir devant sa porte. C'est pas ce qui lui gâchait la vie. A sa remarque, il est obligé de se contenir. L'agresser en jouant la froideur et l'ironie d'un "parce que ça t'intéresse?" n'était pas une option à prendre. Alors il tourne sa langue trois fois avant de parler, ou plutôt son verre sur le bar.

- J'avais pas besoin de ça, c'est tout.

Ca le faisait quand même chier pour la voiture. Plus de permis, plus de voiture. Il avait déjà bien du mal à finir les fins de mois, en racheter une n'était pas envisageable. Heureusement qu'il lui restait la moto. Au pire, avec elle, la prochaine fois, il avait plus de chance de ne pas s'en relever. Ca aussi, il le garde pour lui. En même tant, c'est pas ce genre de détail qu'il l'empêcherait de trouver une voiture à conduire le jour où il en aurait envie. Non, vraiment, c'était pas ça le plus compliqué. Même sans argent et sans permis. Et bien que ça augmentait son risque d'avoir des ennuis. Il n'était franchement plus à ça près. Qu'est-ce qui l'empêcherait de retomber dans la délinquance après tout ? Dans les bagnoles, il y a de quoi faire, ce serait pas difficile de se faire un peu de fric comme ça... Au moins de quoi payer les factures de la maison, de leur maison, qu'il se refusait de perdre... Vu la vitesse à laquelle elles s'accumulaient, ce serait bientôt probablement même sa seule option.

- Bien sûr... Ce que va penser ta soeur... C'est le plus important, là tout de suite. T'inquiètes pas, je serai pas venu, si elle avait été là.

Juste de la tristesse dans la voix, pas une once de reproche. Pas de doute, il se contrôlait, il faisait attention à ce qu'il disait, à surtout ne pas prononcer un mot plus fort que l'autre, à ne pas s'énerver, même si le mot "soeur" lui avait bien fait dresser quelques poils sur le corps, il s'était contenu. Malgré sa dernière altercation avec cette dernière, il avait continué à passer régulièrement devant le bar, rien que pour savoir si Katya décidait ou non d'y revenir. Elle l'avait fait. Elle était revenue. Il avait serré les points, même s'il n'était pas vraiment surpris, puis il avait calmement laisser quelques heures s'écouler avant de pousser la porte. Elle s'excuse. Il acquiesce. Accepté. Pas de cris ce soir. Il espère tenir. Il s'excuserait bien pour la dernière fois lui aussi, mais revenir sur ce qui s'est passé auparavant n'est pas une bonne idée, il a retenu la leçon.

- Bien sûr que c'est pour te voir... T'as repris quand ?

Il croit savoir mais s'il vient régulièrement, ce n'est pas tous les jours non plus. Il connait tous les bars de la ville bien qu'il ait maintenant pris ses habitudes dans un café pas loin de chez eux, plus pratique pour rentrer, mais s'il boit beaucoup, il n'enrichit pas les comptes de Katya, d'habitude, il ne rentre pas chez elle...

Puis arrive le fameux pourquoi... Elle parle d'honneur. Il soupire doucement. C'est donc le moment de se jeter à l'eau.

- J'ai besoin de parler à quelqu'un, Katya. Il y a qu'avec toi que je peux... Tu veux bien ? S'il te plaît.

J'ai besoin de toi, c'était plus court. C'était ce qu'il avait prévu de dire au départ mais il voulait éviter l’ambiguïté, qu'elle mélange cette intention avec ses sentiments. Là, c'était différent.

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- Bien sûr... Ce que va penser ta soeur... C'est le plus important, là tout de suite. T'inquiètes pas, je serai pas venu, si elle avait été là. C’est la seule chose qui lui est réellement venu en tête. Elle ne sait pas quoi dire. Elle ne sait pas quoi faire. Katya. Elle garde trop de choses en dedans et elle finira simplement par imploser à force de ne rien dire. - Bien sûr que c'est pour te voir... T'as repris quand ? Katya, elle ne sait plus comment faire la conversation avec lui. Avec Trent, elle vacille. Elle entend ce que les autres lui disent. Elle en a marre d’entendre les commentaires. Elle n’a pas envie de l’abandonner. Elle n’a pas envie d’être la femme battue qui revient vers son bourreau, mais elle est la mieux placer pour comprendre les maux qui rongent son âme. « Aujourd’hui.» Elle n’a pas envie de le laisser seul, mais elle n’a pas envie de lui faire des faux espoirs. Elle jongle entre ses envies. Elle ne sait plus y faire. Elle n’a pas envie de le blesser. Elle n’a pas envie de se blesser. C’est simplement en train de la rendre folle. Katya, elle ne sait plus comment s’y prendre.

- J'ai besoin de parler à quelqu'un, Katya. Il y a qu'avec toi que je peux... Tu veux bien ? S'il te plaît. Elle a cette foutue impression que son cœur va éclater. Elle a cette impression qu’il ne va pas mieux et elle a envie qu’il s’en remette. Les autres ne cessent de lui dire que ce n’est pas à elle de recoller les morceaux, c’est elle qui a été blessée. Il a été blessé avant elle, par un autre. Elle le connaît trop bien. Lui et ses maux. Lui et son passé. Elle n’a pas envie qu’il puisse souffrir, mais elle ne sait pas comment l’aider sans se faire mal. Sans leur faire mal. La demoiselle. Elle se serre un verre. Elle a besoin de boire quelque chose et il y a de l’alcool dans le sien. Un gin-tonic. La blonde finir par contourner le bar pour s’approcher et prendre place sur une chaise à ses côtés. Elle garde une distance décente entre eux. Elle ne se sent pas à l’aise d’être près de lui. Elle ne se sent pas à l’aise de bien des choses depuis son réveil. Elle s’isole un peu moins, elle reprendre doucement goût à ce qu'elle aimait. Elle avance.

« Tu sais que tu peux me parler. Mais..» Elle avale une gorgée de son verre. « Mais j’en sais rien Trent. Je ne fais qu’entendre des autres de me tenir loin de toi. Je dois avouer que je ne sais plus quoi penser, comme faire. Je n’ai pas envie d’être celle qui revient vers lui qui lève les poings. J’ai envie de t’aider, mais je ne sais pas si je suis réellement la bonne personne pour le faire. Ça n’a pas fonctionné la première fois.» Ils ont fini par se perdre. Il a fini par s’emporter avec elle. C’était risqué, elle le savait, mais l’aimait. Maintenant, c’est différent. Elle ne sait plus. Elle ne pense pas qu’il pourra y avoir un eux à nouveau. Elle manque trop de confiance. La blonde, elle avale une nouvelle gorgée de son verre. « Je veux bien t’écouter par contre.» Simplement. Là. Elle n’a personne pour veiller sur elle, pour lui dire qu’elle devrait le repousser. Elle en a marre des commentaires des autres. Elle est libre de faire comme bon lui semble. Simplement. Elle est libre de l’écouter. Ils sont entourés, il ne risque pas de se passer quoi que ce soit.

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Ainsi, elle a repris aujourd'hui. Il acquiesce doucement. Drôle de coïncidence... il débarque juste le jour où elle reprend le boulot. Faut croire qu'il ne la laissera vraiment pas tranquille. Il veut lui parler. Contre toute attente, elle accepte. Elle s'approche même, contournant le bar pour le rejoindre. Il ne se tourne pas vers elle. Il s'accoude au bar et dépose sa tête entre ses mains. Décider de tout redémarrer à zéro, c'est loin d'être facile. Le faire ici à Memphis, loin de son milieu, ça l'avait été d'autant plus et elle avait été là, à chaque étape, pour le guider, pour le soutenir et surtout pour l'aimer... Ce qu'elle lui avait apporté, jamais personne n'en avait fait autant. Elle était la seule vers qui il pouvait se tourner, malgré tout ce qui s'était passé. Alors, aujourd'hui, il n'est pas venu pour récupérer son amour perdu, dans un acte désespéré. Aujourd'hui, il est au bout du rouleau et par instinct de survie, il cherche la seule main qui pourrait encore se tendre vers lui. C'est pas facile d'être là. C'est pas facile de lui faire face dans cet état. C'est pas non plus facile d'oser reconnaître qu'on a besoin d'aide et qu'on s'en sortira pas tout seul. Il en était là.

Pourtant, parler l'est encore moins. Elle était au courant de son passé, oui. Des grandes lignes. Des informations qu'il avait laissé s'échapper. Celles qu'il avait accepté de lui donner. Un historique social. Les placements. L'existence de silhouettes qui venaient rejoindre sa mère contre du fric, quand son père avait le dos tourné. Le mépris complet qu'il ressentait envers son père, un fou, une ordure, il le disait. Un bagage lourd à porter. De la violence bien sûr, physique, morale. Une vie brisée dès le début. Oui, elle savait tout ça. Pour autant, jamais il n'était rentré dans les détails. Trent était quelqu'un de secret qui gardait tout pour lui. Il avait suffisamment appris à encaisser et à contenir ses émotions pour avoir envie de les partager. Il était venu à Memphis pour repartir à zéro. Et la peur, l'humiliation, le dégoût, la haine ne se racontent pas, tout cela se subit. Il n'avait pas non plus été un ange là-bas, faut pas croire, il n'en était pas fier non plus. Il y a beaucoup de choses qu'elle ignorait. Pourtant, aujourd'hui, elle connaissait la douleur d'avoir été victime de celui qu'on aime. De celui qui est censé nous chérir et nous protéger alors peut être qu'un peu au moins, elle pouvait comprendre à quel point une seule seconde de cette situation peut nous marquer à jamais.

- Les autres ne savent pas, ils ne peuvent pas comprendre, ils ont peur... Tout ça c'est entre toi et moi. Peut-être pas... mais j'ai que toi.

Il n'avait pas du tout accepté qu'elle le quitte. L'idée de la perdre à tout jamais était toujours aussi inconcevable. Mais c'était pas le seul problème. C'était lui le problème. Il avait dit avoir besoin de parler. Il soupira à nouveau. C'était pas facile. Il ne savait même pas vraiment ce qu'il avait réellement besoin de dire, encore moins ce qu'il pouvait dire. Il pose ses mains sur le comptoir et commence, sans la regarder, les yeux dans le vide, parlant doucement presque sans émotion, le regard vide, la voix monocorde.

- J'ai toujours rêvé qu'un jour ça irait mieux... qu'il y avait une place pour moi quelque part, pour être heureux... ça m'a fait tenir, aller de l'avant, de continuer à y croire. Je pensais que ce serait ici, avec toi. Grâce à toi. Tu étais comme un soleil dans ma vie... La meilleure chose qui me soit arrivée. Mais...

Il y a des fleurs qui sont capable de percer le goudron pour voir le jour. L'espoir fait vivre. Il lui avait toujours gardé une place. Il n'avait jamais été aussi heureux qu'avec Katya. Avec elle, tout avait été une découverte. Elle lui avait offert une place dans un monde qui n'était pas le sien, il avait fait de son mieux pour la rendre heureuse, jusqu'à ce que tout dérape.

- Je me suis trompé. J'aurais jamais du t'approcher. Ca ira jamais mieux... J'y arrive pas, Katya. Je sais pas quoi faire. Je pourrais jamais effacer ce que je t'ai fait, je veux pas que ça recommence. Ca me rattrape. Ca m'étouffe. J'en peux plus de lutter, j'ai plus la force. J'abandonne.

Ca, c'est clair. Il suffisait de le voir aujourd'hui. Il avait tout perdu, il n'avait plus rien d'autre qu'un profond désespoir. Il n'avait plus aucune idée de pourquoi il se levait le matin. Il n'avait plus envie de rien. Depuis qu'il l'avait vu avec son nouveau mec en plus, il avait même lâché le combat pour la récupérer. C'était elle ou rien. La situation était insupportable. Il s'était condamné, détaché de la vie, se noyant dans une destructrice pulsion de mort. Trent, il était intense quand il aimait, intense quand il détestait, intense quand il déprimait. Alors qu'est-ce qui avait bien pu se passer pour qu'il soit capable d'assez de détachement pour réussir à venir lui dire ce qu'il ressentait ? Habituellement, face à quelqu'un, d'autant plus face à Katya, tout se mélangeait bien trop pour qu'il soit capable d'exprimer vraiment ce qu'il pensait au fond de lui. Trent, il était du genre à frapper plutôt qu'exprimer ses peurs et ses faiblesses. Du genre à choisir le combat à la fuite. Alors ? Ca vient... Laissez lui encore un peu le temps de rassembler son courage pour oser dire tout haut ce qui le hantait tout bas. C'était une drôle de coïncidence qu'elle ait choisi de reprendre aujourd'hui, lui permettant ainsi de la rejoindre... Il releva la tête de ses mains et pu lui annoncer la nouvelle en face.

- Il va crever, Katya... Ma mère m'a appelé.

Pour lui, lâcher cette information, c'était comme lâcher une bombe. En lui, c'était le cas. C'est l'effet que ça lui avait fait. Même avant de quitter New York, ça faisait bien longtemps qu'il n'avait pas donné signe de vie à sa mère. Rupture de contact. Katya le savait. Elle lui avait posé la question. Quand il avait décroché, jamais il n'aurait seulement imaginé que ce numéro masqué pouvait être celui de sa mère... Il ne savait même pas comment elle l'avait trouvé, encore moins pourquoi elle avait pris la peine de le faire. Il n'avait gardé contact avec personne là-bas. Jamais même il n'aurait imaginé entendre encore une fois sa voix... A vrai dire, il aurait même préféré qu'elle s'abstienne de lui donner des nouvelles. Même une bonne nouvelle n'est pas facile à gérer quand elle vient remuer le passé. Mais voilà, maintenant il savait.

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- Les autres ne savent pas, ils ne peuvent pas comprendre, ils ont peur... Tout ça c'est entre toi et moi. Peut-être pas... mais j'ai que toi. Elle aurait aimé que ca se passe autrement, elle aurait aimé être capable de l’aider. De se sentir mieux. Un peu mieux. Elle n’a pas envie qu’il se perde, elle n’a pas envie qu’il souffre, mais elle ne trouvait pas la force de reculer dans le passé. Des éclats brisés. Elle sait que les autres ne cessent de lui dire de rester loin de lui, de ne plus s’approcher, mais elle n’a pas envie de faire ce que les autres lui disent. Elle a envie de l’aider. Elle a envie d’écouter. Ce soir. Elle voit la tristesse dans le fond de son regard à lui et elle n’a pas la moindre idée de rester pantoise sans réagir, de se poser et de ne rien dire. Katya, elle n’aime pas qu’il souffre, mais elle ne sait pas quoi faire pour qu’il se sente mieux.
Elle se pose pourtant à côté de lui, laissant une distance décente entre eux. La promiscuité lui fait peur. Elle a du mal à faire confiance depuis cette fois. Depuis les coups trop forts. Les souvenirs remontent. Elle sait. Elle a envie d’oublier pour le moment. C’est plus simple. Elle n’aime pas la pression qu’il met sur ses épaules. Il n’a qu’elle. Elle n’a que sa famille et Jesse. Jesse. C’est compliqué. Elle ne se sent pas prête. Pas encore. « Je suis là.» Un souffle. Elle le regarde. Il ne la regarde pas. Elle le connait assez pour savoir qu’il n’est pas dans le meilleur des états.

- J'ai toujours rêvé qu'un jour ça irait mieux... qu'il y avait une place pour moi quelque part, pour être heureux... ça m'a fait tenir, aller de l'avant, de continuer à y croire. Je pensais que ce serait ici, avec toi. Grâce à toi. Tu étais comme un soleil dans ma vie... La meilleure chose qui me soit arrivée. Mais... Je me suis trompé. J'aurais jamais du t'approcher. Ca ira jamais mieux... J'y arrive pas, Katya. Je sais pas quoi faire. Je pourrais jamais effacer ce que je t'ai fait, je veux pas que ça recommence. Ca me rattrape. Ca m'étouffe. J'en peux plus de lutter, j'ai plus la force. J'abandonne. Elle a envie de lui hurler de ne pas penser ça, mais elle n’a pas la moindre idée de la meilleure chose à faire. Elle ne sait pas. Elle ne sait pas ce qu’elle doit dire pour qu’il se sente mieux Katya. Elle aurait voulu que ca se produise autrement, mais il faut croire que leur couple n’était pas fait pour durer. Elle a peur. Elle a peur de retourner vers lui et que rien ne s’arranger. Comme elle a peur qu’il finisse plus mal. Elle n’a pas la moindre idée de comment gérer la situation. Katya. Elle ne parle pas. Elle se contente d’écouter. C’est mieux ainsi. Parce qu’elle n’a pas la moindre idée de ce qu’elle pourrait dire pour le rassurer.

- Il va crever, Katya... Ma mère m'a appelé. Son souffle se couple. Elle ne s’attendait pas à ça Katya. Elle a envie de le prendre dans ses bras pour le consoler. Elle a envie de le rassurer. Elle ne sait pas. Elle s’en fou. Elle sait que ça l’affecte. Elle sait que ça doit le ronger. Une gorgée de son verre et elle se lève pour le prendre dans ses bras. Ça lui fait mal. Elle à envie de reculer par automatisme, son corps se crispe, mais elle lutte contre les mécanismes de défense qui ont pu prendre possession de son être. Refoulement. C’est plus facile d’oublier. De ne pas se souvenir que de se confronter aux souvenirs violents. Elle ne se souvient pas de leur altercation. Elle ne sait que les mots des autres. Que des bribes. Que des soupçons. Elle n’a pas envie de se souvenir. Une accolade. Elle le serre dans ses bras. Elle n’a pas envie qu’il soit seul avec cette peine. C’est la seule chose qui lui vient en tête à présent. Un souffle. « Tu vas faire quoi?» Est-ce qu’il va s’y rendre. Est-ce qu’il va parler avec sa famille. Elle ne sait pas. Elle ne sait pas ce qu’il veut faire. Ça lui fait étrange de le prendre dans ses bras. Mal. Elle sait que c’est fini. Elle pense que c’est fini. C’est trop complexe.

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