Usually, I'm not like this

Obéryne ∞ Isabel

Isabel raccompagna sa patiente à la porte en la rassurant. C’était sa dernière séance et la jeune femme qui souffrait de dépression aux premières séances s’était effacée pour laisser place à une jeune femme sûre d’elle et confiante en son avenir. C’était pour ce genre de séance que la psychologue savait qu’elle avait fait le bon choix de carrière. Les blessures de l’âme sont souvent les plus difficiles et les plus longues à guérir. Elle ne se prétendait pas meilleure que les médecins, loin de là, mais quand elle voyait Juliet Hopkins, elle se disait qu’aucun médicament n’aurait pu faire ça. Rendre cette lumière dans ses yeux.
Retournant à son bureau, la jeune femme s’autorisa à souffler quelques minutes. Elle avait une heure de battement, un patient ayant annulé. Les autres jours, elle aurait accueilli ce repos avec joie et en aurait surement profité pour mettre à jour ses dossiers et lire quelques articles. Mais pas aujourd’hui. Elle se remémora la soirée de la veille…

Après une énième discussion au sujet des enfants, Peter s’est enfermé dans son bureau sous prétexte de travailler. C’était la première fois que le ton était monté entre eux. C’était aussi la première fois qu’il n’était pas monté se coucher avec elle. Lorsqu’elle lui avait posé la question, il n’avait pas levé son regard pour lui répondre qu’il avait encore du boulot. Elle était restée plantée là quelques minutes avant de se décider à monter dans la chambre. C’était la première fois qu’ils dormaient séparément alors qu’ils étaient tout deux. Et ce matin, quand elle s’était réveillée, Peter était déjà parti. Avait-elle poussé le bouchon trop loin cette fois ? Jetant un petit regard sur sa montre, elle se décida à téléphoner à son mari.

« Isa, je comptais justement t’appeler. Je dois partir quelques jours voir où en sont les travaux d’expansion à La Nouvelle Orléans. »

Quelle surprise… Isa ne comptait plus le nombre de fois où, après ce genre de discussion, son mari avait comme de par hasard un voyage d’affaires inopiné. Elle avait fini par trouver ça normal.

« Isabel ? Chérie ? »

Se reprenant, la brune répondit

« Oui… Tu seras absent combien de temps ? »

Elle pouvait déjà répondre à sa place… « Je ne sais pas encore. Quelques jours voire dix jours maximum… »

« Je ne sais pas encore. Quelques jours voire dix jours maximum… »

Bingo ! Soupirant, elle savait qu’elle n’allait pas revoir son mari avant minimum un mois.

« Je dois te laisser ma chérie, l’avion va décoller. Je t’aime »

Elle n’eut pas le temps de lui répondre que Peter avait déjà raccroché. Isa regarda son téléphone un instant avant de le reposer. Ce ne fut qu’à ce moment qu’elle s’aperçut que les larmes maculaient ses joues. Elle les laissa et se laissa aller. Pleurant encore et encore. Sur quoi ? Elle ne savait pas elle-même mais elle e sentait lasse. Alors elle pleura. La tête enfouie dans ses bras sur son bureau. Combien de temps ? Elle ne savait pas mais fut interrompue par la sonnerie de son téléphone. C’était son assistante qui la prévenait que son dernier patient de la journée était arrivé. Obéryne Connely…
Isabel se releva vivement et répondit qu’elle allait le recevoir dans cinq minutes. La jeune femme se dirigea vers les toilettes attenantes à son bureau et se débarbouilla. Elle se remaquilla vite fait et se regarda dans le miroir en face d’elle. Elle avait les yeux encore un peu rougis mais rien de bien méchant. S’efforçant de sourire à son reflet, la brune remit le masque qu’elle arborait à chaque fois et alla accueillir son patient.

Elle le fit entrer et comme à chaque fois, son cœur manqua un battement. Elle se rendait bien compte de l’effet que cet homme avait sur elle… Lui serrant la main, Isabel lui fit un petit sourire.

« Bonjour Obéryne… Installez vous je vous en prie… »

Elle-même pris place en face de lui.

« Alors comment allez-vous aujourd’hui ? »

La séance se déroula tant bien que mal. Isa avait fréquemment des moments d’absence. Repensant aux évènements qui venaient de se dérouler. A la manière dont elle avait craqué… Ce n’était pas dans ses habitudes. Elle n’arrivait pas à comprendre pourquoi aujourd’hui était différent. Peut-être parce qu’elle avait eu du temps pour elle ? Elle ne savait pas trop.
Une sirène de police au loin la fit sursauter. Regardant l’heure, elle vit que la séance avait déjà touché à sa fin dix minutes plus tôt et qu’Obéryne la fixait sans mot dire. Laissant échapper un petit rire embarrassé, la jeune femme lui dit

« Hmm… On dirait bien que je me sois laissée déborder cette séance. Je suis désolée. Bien évidemment, je ne vous la compterai pas. »

Le raccompagnant à la porte, elle lui dit doucement

« A mardi prochain alors. Portez-vous bien Obéryne »

Une demi-heure plus tard, la jeune femme éteignit les lumières de son bureau et se dirigea vers la sortie. Il y avait encre de la lumière dehors mais la nuit commençait doucement à tomber. Allant vers sa voiture, Isabel marqua un temps d’arrêt en voyant son dernier patient près d’elle.

« Obéryne ? Que faites-vous là ? Avez-vous oublié quelque chose ? »

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Obéryne ∞ Isabel

Tout en marchant vers sa voiture, une foule de pensées envahissait Isabel. Elle avait bien remarqué que son patient lui avait demandé si ça allait. C’était la première fois qu’Obéryne posait une question de ce genre. C’était soit un signe qu’ils progressaient tous les deux soit qu’elle devait avoir vraiment une sale tête… Elle espérait que ce soit la première option plutôt que la deuxième. D’une cela prouvait que son travail n’était pas si inutile que ça et de deux, elle ne voulait pas paraître débraillée devant lui. C’était idiot. Obéryne Connely n’était qu’un patient comme un autre… Du moins, il devrait l’être pourtant la psy savait pertinemment que ce n’était pas le cas. Mais elle préférait ne pas s’appesantir là-dessus. Pas pour maintenant.
La tête ailleurs, la jeune femme sursauta en voyant l’objet de ses pensées se matérialiser devant elle. Aussitôt, la psychologue refit surface et elle lui demanda si tout allait bien, si il avait oublié quelque chose dans son bureau. Il semblait hésiter… C’était la première fois qu’elle le voyait buter sur des mots comme ça. Lors de leurs séances, il l’avait plus habituée au silence ou bien ces derniers temps à des morceaux disparates de sa vie. Jamais, il ne lui avait paru hésitant. Pas comme en ce moment.

« Oui ? », l’encouragea-t-elle avec un doux sourire.

Quand elle l’entendit lui proposer d’aller boire un verre, Isabel le regarda surprise. Surprise d’entendre une telle proposition de sa part. Surprise de ressentir ce qu’elle ressentait en ce moment. Un petit frisson d’excitation. Un minuscule pas vers l’interdit… « Je pense que changer votre quotidien ne pourrait pas vous faire de mal. » Cette phrase tournait dans la tête de la brune. Il n’avait pas tort. De toute façon qu’allait-elle faire ? Rentrer chez elle dans une maison vide avec pour seule compagnie un silence assourdissant. Elle aurait cuisiné un truc vite fait, se serait assise seule à la table dans la salle à manger… Pour finir pelotonnée dans son fauteuil avec un livre qu’elle tenterait de comprendre sachant pertinemment que son esprit serait ailleurs. Elle aurait pu téléphoner à Callie pour lui proposer de sortir mais leur soirée était le jeudi et non le mardi. D’ailleurs, elle n’était pas sûre de pouvoir expliquer le pourquoi du comment de ce changement à sa meilleure amie. Tant qu’elle n’aurait pas fait le tri sur ce qui s’était passé la veille avec Peter, elle ne pourrait pas en parler avec elle. La connaissant, Callie la pousserait dans ses retranchements et l’obligerait à dire des choses qu’elle n’était pas prête à prononcer ni à admettre.

Levant les yeux vers son patient, les mots sortirent alors avant même qu’Isabel n’en ait eu conscience

« Vous avez raison… C’est d’accord pour le verre… »

Lui adressant un petit sourire, elle rajouta

« Ça serait plus pratique de ne prendre qu’une seule voiture dans ce cas si ça ne vous dérange pas de me reconduire ici après… »

Par cette phrase, elle lui faisait comprendre qu’elle le laissait décider de l’endroit et qu’elle se laisserait conduire où il le voudrait. Un pas de plus vers l’interdit mais Isa ne s’en rendait pas vraiment compte. Elle était dans un état second ce soir et ne voulait pas plus réfléchir que ça.

La jeune femme le suivit donc vers sa voiture et s’installa côté passager. Elle se sentait étrangement sereine maintenant qu’elle avait décidé d’aller avec lui. Isa savait qu’elle ne risquait rien avec Obéryne. Enfin qu’elle ne risquait rien physiquement parlant. Quand à ses sens, c’était une toute autre histoire. Une fois qu’ils furent tout deux dans le petit habitacle, la jeune femme sentit la présence d’Obéryne l’envelopper tout entière. Il était si proche d’elle… L’observant du coin de l’œil, Isabel nota encore une fois à quel point il était différent des hommes qu’elle avait pu croiser dans sa vie. Il y avait un côté sombre chez lui qui la troublait énormément et qui l’attirait en même temps… Tout à sa contemplation, la jeune femme ne se rendit pas compte que la voiture avait arrêté de rouler et qu’il la regardait en silence. La jeune femme rougit se sentant comme une écolière prise en faute.

« On est arrivé ? », lui dit-elle avec un petit rire embarrassé.

Sortant de la voiture, elle le suivit à l’intérieur et regarda autour d’elle. Tout le monde était en mode décontract. Baissant les yeux sur son tailleur crème, la jeune femme se sentit légèrement mal à l’aise.

« Je crois bien que je détonne ici… », dit-elle avec un petit sourire.