story of my life«
Mon cher Liam,
Je ne sais pas comment te l’écrire, les mots me manquent…
Comment te dire que je te quitte? Que je quitte cette ville, ce pays même? Je m’en vais, on m’a offert un poste d’enseignement à l’extérieur du pays. Je ne pouvais refuser, tu comprends? C’est une belle opportunité pour moi, pour ma carrière. J’espère que tu me comprendras…
Je suis désolée… »
Une lettre. Un tout petit bout de papier rosé, parfumé de son odeur sucré. Comment pouvais-je rester calme? Comment ne pas m’emporter? Comment l’accepter? Et ces commentaires, ces remarques sur le fait de rester calme… Elle savait comment j’étais…
Je lançais la feuille. Je devais évacuer cette colère en moi. Je frappai la table, renversai la chaise, hurlai de mécontentement. La haine montait en moi, ça brûlait dans ma gorge, un poignard transperçait mon cœur, j’avais mal. Des larmes coulaient le long de mes joues. Je tentais de mon mieux de les retenir, mais cela m’était impossible.
** Trois jours plus tard **
Cela faisait des jours que je restais enfermé dans mon miteux appartement. J'étais cloué dans mon lit, incapable de me lever pour faire quoi que ce soit. Il y avait des boîtes de pizza vide sur mon lit et quelques pots de crèmes glacées à moitié mangé qui traînaient-ci et là. Cliché, non? Le pauvre gars en peine d'amour qui se nourrit à la crème glacée au chocolat. J'avais bien tenter de noyer ma peine avec l'alcool, mais il m'en manquait et je n'avais pas le goût de sortir, d'autant plus que je voulais trouver un remède pour guérir et que ces repas semblaient être le meilleur que j'avais essayé...
Toc toc tocMerde, ça pouvait être qui? Ma chérie, peut-ête? Peut-être qu'elle revenait sur sa décision? Peut-être qu'elle m'aimait au fait? Je me levai d'un bond et couru en direction de la prote d'entrée. J'ouvrais rapidement., le sourire aux lèvres et c'est alors que je vis... Lawrence? Bordel, qu'est-ce qu'il foutait là?
Je lui aurais bien fermé la porte au nez, lui avec ses airs de prétentieux ! Il avait beau être mon frère, mais il était bien le dernier que je voulais voir en ce moment.
**
Depuis que nous savions qu'il avait le cancer, tout a changé. Sa vie, la mienne, celle de nos parents...
Pour lui, cela a bouleversé sa vie. Apprendre à dix-sept ans que vous avez le cancer, comment vous réagiriez? Tout le monde lui offrait du soutien. Tout le monde lui démontrait de l'empathie, de la tristesse. Tout le monde lui disait : « Ne t'inquiète pas, tout va bien aller...». On lui apportait des fleurs, des jouets, des livres, bref, n'importe quoi pour lui changer les idées. Il avait peut-être le malheur d'être malade, mais au moins il avait assez d'amour et d'attention autour de lui pour se sentir bien...
Quant à mes parents, ce fût tout un choc. Leur fils aîné était gravement malade, ce n'était pas banal. Ma mère a arrêté de travailler pour passer tout son temps auprès de son garçon malade. Mon père avait assez d'argent, ce n'était pas ça qui allait les empêcher de rester auprès de leur fils. Eux aussi, ils recevaient la sympathique des gens. Ils allaient les retrouver à l'hôpital ou ils venaient à la maison et leurs disaient : « Mon dieu que vous êtes brave ! Il faut être fort pour vivre ce genre de situation ! ». Tout le monde s'occupait d'eux...
Et qu'est-ce qui m'arrivait à moi? Vous pensez qu'un frère ne ressent pas de la tristesse quand son frère est malade ? Vous pensez qu'il peut se débrouiller, qu'il ne mérite pas d'attention lui aussi? Vous le croyez invincible, que rien ne l'affecte? Et pourtant, c'était tout le contraire dans mon cas. Je souffrais autant que Lawrence, autant que mes parents, mais cela m'était interdit. Comme si la douleur ne pouvait être vécue que par eux et que moi, je n'avais pas un mot à dire. J'étais seul dans mon coin, quand la visite venait pour des nouvelles, ils s'arrêtaient au chevet de Lawrence, puis ensuite ils allaient voir mes parents et ils s'en allaient... Sans prendre le temps de s'arrêter devant moi, sans prendre le temps de me parler, de m'écouter... Je n'existais plus, je ne vivais plus, dans un sens, car peu importe ce que je disais ou ce que je faisais, ça leur était égale. La seule chose qui les préoccupait, c'était Lawrence et personne d'autre.
**
«
Salut p’tit frère. »
Je lui souris, n'ayant pas envie de parler. J'étais déçu de le voir là, j'aurais préféré voir une autre personne...
Je l'invitai tout de même à rentrer. Même si j'étais en froid avec lui, je n'étais pas mal élevé! Il entra alors et je me dirigeai vers le canapé, où je m'écrasai, allumant le téléviseur pour briser le silence froid qui régnait dans mon appartement.
«
Comment tu vas? »
«
La pleine forme, tu vois pas? », répondis-je sans même le regarder.
Non, je n'allais pas bien.
**
Depuis qu'il avait reçu son diagnostic, j'avais changé. Pas tant que ça, en fait...
L'école, ça n'a jamais été mon truc. Mes notes étaient nulles, mon comportement l'était tout autant. Je passais plus de temps en retenue qu'en classe. Je n'y allais pas toujours, préférant me balader dans les rues, à visiter des musées, etc... J'avais beau me forcer à l'école, cela n'intéressait personne. J'avais découvert la drogue, l'alcool, le sexe, tout. J'ai essayé plusieurs trucs, des expériences dont je me souviens encore, mais que cela intéresse ni mes parents, ni mon frère. J'ai vécu toute mon adolescence ainsi...
**
Lawrence s'approcha de moi et posa sa veste sur une chaise avant d'ajouter :
«
Je suis au courant à propos de... »
Il n'en dit pas plus, j'en avais pas besoin. Je savais très bien ce qu'il voulait me dire... Je me replacai, j'étais à présent assis, mais j'avais toujours mon attention sur cette télévision.
«
Je suis désolé... »
Je ne réagis pas. Je n'avais vraiment pas envie de lui parler de ça...
«
Tu sais, quand elle est venue me voir, elle n'avait vraiment pas l'air bien... »
«
Quoi... Comment? Elle est venue te voir? »
J'ai vu dans son regard qu'il avait trop parlé. Je passai ma main dans mes cheveux, complètement sous le choc à la suite de ces paroles. Moi, son petit copain, je n'avais eu le droit qu'à une putain de lettre, alors que lui, elle avait eu le droit à sa visite? Je me levai d'un bond et dit :
«
Tu sais quoi, dégages ! »
Lawrence n'insista pas, sachant qu'il avait déjà merdé et il quitta mon appartement. Je le suivais et une fois ses deux pieds à l'extérieur, je claquai la porte et retournais dans mon lit, décidé de ne plus ouvrir la porte...