Nom : darcy. le nom de son père. si ça n'avait pas aussi été celui des inséparables, sûrement aurait-il eu beaucoup de mal à le porter. peut-être en aurait-il déjà changé. mais c'est à ce nom que la famille répond. et quoi de plus important que la famille ? √ Prénom : nicolaus. oscar ne sert qu'à faire joli, sur la carte d'identité. il paraît que c'est cool, les seconds prénoms. passé de mode, mais cool. √ Âge : vingt-sept ans. pour beaucoup, c'est la trentaine qui approche. la crainte de passer à la décennie supérieure, celle qui inspire tant l'âge adulte, les responsabilités. lui, il ne voit que l'âge maudit. l'âge de mort de trop d'artistes. et certains soirs où tout va mal, secrètement, il espère que cet âge sera maudit, pour lui aussi. il espère que la mort le prendra pour un suffisamment bel artiste, et l'arrachera de ce caniveau géant. prière modeste et silencieuse. √ date et lieu de naissance : le deux février, à calgary. bien que né dans une ville anglophone, il a appris à parler le français dès tout petit, et a étudié dans des établissements francophones. son bilinguisme lui a été utile lors de son emménagement aux états-unis, sans pour autant rendre son intégration dans la vie américaine moins fastidieuse. √ vos origines : canadien. il n'a pas la nationalité américaine, mais possède un statut — et donc une carte — de résident permanent. √ Métier : comédien. pas de caméra. une simple scène. des lumières. un corps en mouvement. aucun artifice. jamais. il rêve d'en faire sa vie. qu'un jour, son nom sur une affiche paye suffisamment pour qu'il puisse arrêter de faire autre chose, et s'y consacrer entièrement. il rêve que son nom rapporte de quoi payer les frais de sa vie. en attendant, il sert à manger aux enfants dans une cantine, et aide à préparer les repas le matin. en d'autres termes, on pourrait dire que son job de cantinier l'aide à moins paniquer en fin de mois, en plus de lui laisser tout le temps nécessaire pour répéter et jouer, les après-midi et les soirées. √ Orientation sexuelle : bisexuel, à forte tendance homosexuelle. il a déjà embrassé des filles. il a déjà eu quelques petites histoires avec elles. mais ses ailes ne se déploient que lorsqu'il est perdu dans les bras d'un homme. il n'exclut pas pouvoir aimer le beau sexe, et en apprécier les avantages. l'amour est avant tout psychologique. mais les hommes ont une beauté et une silhouette protectrice qui lui procurent une sensation de chaleur au fond du corps. une chaleur qu'il a besoin de ressentir. √ Statut matrimonial : seul. il a peur des relations amoureuses. peur des gens. il aime trop facilement. il a beau être doté d'une lucidité évidente, il devient — comme beaucoup — complètement aveugle lorsque tout cela le concerne. √ côté financier : on s'en sort. il ne va pas prétendre rouler sur l'or. la plupart de l'argent de son père est allé à sa mère, après sa mort, et elle ne verse que très peu à ses enfants. tout simplement car ils ne le lui demandent pas. ils ont toujours préféré se débrouiller par eux-mêmes. alors, lorsqu'il a besoin d'une avance, elle est là. mais il ne veut pas dépendre d'elle. ni de personne d'autre. il n'a de toute manière jamais été un gros dépensier. il veille à ne pas trop taper dans les économies que sa tante lui a laissées à sa mort, et préfère se serrer la ceinture à la fin du mois, et tout garder pour... plus tard. il ne sait pas encore pourquoi, mais ça viendra. Caractère : taciturne, méfiant, intimidable, introverti. parler de lui, ce n'est pas trop son truc. parler de soi, c'est se juger. et il déteste porter un regard sur sa personne. il préfère parler d'autre chose. voire ne pas parler du tout. sourire. fuir les groupes. s'asseoir dans un fauteuil, dans le coin de sa spacieuse chambre, et dévorer un livre qui attend sur ses étagères depuis de trop longs mois, parfois même des années. il ne déteste pas les gens, ce sont les gens qui semblent le détester. il s'efforce de ne rien faire de mal. il fait même attention à tout faire bien, à avoir l'air sociable, avenant. il l'est. on ne le voit pas, et bien souvent, il demeure invisible. petite chose sur le passage de laquelle on ne se retourne jamais, petit être vers lequel on ne fait que rarement le premier pas. si doux, malgré cela. sensible, loyal, tolérant, rêveur. le monde du voisin est toujours plus beau. et plus beau que le voisin, encore, il y a les étoiles. ces petites taches qui paillettent le ciel, et lui font croire en un monde meilleur. il rêve de pouvoir les toucher. d'en décrocher tout un bouquet et de l'offrir, un jour, à la personne qui fera battre son coeur pour le reste de son existence. rêver est interdit dans la plupart des sociétés. selon eux, on n'a que ce qu'on mérite. il n'est pas de cette trempe, et préfère croire que les rêves sont faits pour être défendus, et qu'un jour on pardonnera aussi facilement aux rêveurs qu'à tous les autres. indépendant, impliqué, créatif, timide. timide, oui. mais pas sur scène. le rideau levé, nicolaus disparaît, et le personnage qu'on lui a demandé d'incarner prend possession du moindre de ses mouvements. son corps s'articule, ses lèvres prononcent quelque poésie dont il n'a que subrepticement conscience. la magie de l'interprétation le libère, et lui offre un second souffle. toute timidité s'envole alors, et il est enfin libre. libre de s'exprimer, libre de s'épanouir. libre de vivre. lucide, réfléchi, observateur, mature. un peu trop. beaucoup trop. le monde a une couleur qui n'est pas si belle, et il a beau mettre tout en oeuvre pour lui apporter quelques nuances plus claires et plus gaies, il sait qu'il n'y peut rien. les grands auteurs ont les mots pour dire ce qu'il pense, et c'est pour ça qu'il les utilise, les cite. sa maturité est venue très tôt. il a toujours préféré les grands mots des grandes personnes aux babillages des enfants. un contraste avec sa rêverie permanente. les pieds sur terre, mais le nez dans les étoiles. obstiné, jaloux, rancunier, mais le mot juste. mots ne dépassent que rarement les pensées. lorsqu'ils se font trop violents, ils fondent sur sa langue, et il ravale l'amertume d'une parole trop sentie. il se tait, ou bien finit par l'enrober d'une douceur et d'un tact parfois mielleux, mais jamais menteurs. on lui a appris à bien se tenir, et il se tient bien. il sait conseiller. il sait faire en sorte que les autres ne reproduisent pas ses propres erreurs — pour un peu qu'on suive ses conseils. il fait attention. les mots sont à double tranchant. ils peuvent être aussi tendres que cruels, pour qui sait les manier. et il n'est pas en reste. il pourra avoir la simple phrase qui vous réchauffe le coeur, tout comme le mot qui vous fera l'effet d'une douche froide. √ groupe : cœur d'artichaut. il souffre. se renferme. finit par fuir. et par continuer de fuir. fuir jusqu'à être rattrapé. jusqu'à ce qu'une paire d'yeux se plonge au fond des siens. et, immédiatement, il ne demande plus qu'à être aimé.  

the last song
nicolaus est un triplé. ouais, y en a deux comme lui qui se promènent, quelque part dans le monde. triplés un peu étranges, par ailleurs : deux garçons et une fille. comme si la nature avait décidé de mélanger des faux jumeaux et des vrais. √ sa soeur, megara, vit en france depuis trois ans. clyde, son frère, est parti à peu près en même temps, avec l'objectif de faire un genre de tour du monde. ils envoient très régulièrement photos et lettres à leur frère, en plus d'une correspondance régulière par mail. nicolaus se sentait stupide, au début, à tout garder au fond d'une boîte. puis il a acheté un album, dans lequel il met conserve tout ce que ces morceaux de lui envoient depuis quelques années. √ il est le dernier de la famille à vivre à memphis, mais aime trop cette ville pour la quitter. il a mis des années à s'y habituer, et n'a plus aucune envie de partir, désormais. parler anglais ne lui a pas suffi pour se faire une place, lorsqu'il est arrivé du canada. s'en sont suivies de longues années de souffrance et d'absence de repères. √ il a toujours été très proche de sa tante, qui n'a malheureusement pas quitté le canada. ils se sont beaucoup parlés par webcam et par téléphone, et il allait lui rendre visite à presque toutes les vacances. son père a bien tenté de l'en empêcher, mais il ne réclamait alors rien d'autre qu'un peu d'argent pour un billet d'avion, tandis que megara et clyde dépensaient des sommes folles en tout. sa tante est décédée il y a un an et demi, et lui a légué la plupart de ses biens, n'ayant pas d'enfants. √ lorsqu'il a eu quinze ans ans, il a été attiré par un homme. un bel homme. plus vieux que lui, mais cela n'avait encore rien de choquant. cet amour lui a fait peur, mais megara et clyde l'ont poussé à faire son coming-out. sa mère a avalé la pilule, sans trop de commentaires. elle lui a déclaré des années plus tard, après la mort de son père, que tout ce qui importait était son bonheur. son géniteur, lui, prit en grippe le plus fragile des triplés au moment de la révélation, et passa la fin de sa misérable existence à tenter de lui faire assimiler qu'être homosexuel était répugnant, une abomination sans nom, et complètement indigne d'un darcy. le reste de son adolescence et le début de sa vie adulte furent un long et impitoyable combat pour tenter de s'assumer ; poussé d'un bord par son frère et sa soeur, écrasé — broyé même — de l'autre par son père et la passivité de sa mère. √ il a commencé à réellement s'accepter en tant qu'être capable d'aimer les hommes — et les femmes, croit-il — après la mort de son père, seulement. le reste n'a été qu'un calvaire où il n'avait aucune idée de ce qui était « bien » ou « mal ». il en a tant souffert qu'il est tombé en dépression de ses seize ans jusqu'à la mort de son père, il y a quatre ans. √ quand il avait vingt ans, il a fait une misérable tentative pour mettre fin à ses jours, et a séjourné en hôpital pendant longtemps après ça, non par problème de santé mais par soucis de recouvrir un semblant de stabilité psychologique avant d'affronter à nouveau la dure réalité. cette année de sa vie a été le point culminant de sa dépression, et les années qui suivirent, jusqu'à la mort de son père, furent un combat intérieur perpétuel pour tenter de retrouver confiance en lui, malgré les ignominies qu'il s'entendait attribuées. √ son frère et sa soeur ont toujours été beaucoup là pour lui. mais ce qui l'a sauvé, c'est le théâtre. il s'est avéré très bon, et très à l'aise sur scène. il a laissé tomber durant son adolescence, mais après sa tentative de suicide, il a été fortement encouragé à reprendre par sa psychiatre. il s'y est plongé corps et âme, et a progressivement appris à construire sa vie autour du sentiment de plénitude qui l'envahissait lorsqu'il montait sur scène. √ il est allergique aux graminées, et qui dit printemps dit enfer véritable pour lui. c'est la seule chose qui l'a toujours retenu de déménager à la campagne. il aime les grands espaces, lorsqu'ils sont naturels et non-aménagés par l'homme. il adore se promener en forêt, notamment. √ contre toute attente, il est tatoué. il a les oreilles percées, aussi, depuis peu. son frère s'est gentiment moqué de lui, avant de reconnaître que ça lui allait plutôt bien. √ il a un chat, hamlet, qui passe son temps à s'échapper par la fenêtre et à aller squatter chez son voisin. s'il ne le trouve pas dans son appartement, il va toquer à la porte d'à côté sans se poser plus de questions. pour autant, le matou lui donne de l'amour tant qu'il le peut ; quand il le veut bien.√ il a joué du piano pendant plusieurs années, et rêve parfois à reprendre. il adore lire, regarder des films, aller voir théâtres et opéras, sortir au cinéma, aller au musée et faire toutes les expositions organisées par la ville. memphis est un centre de culture incroyable, et c'est l'une des raisons pour laquelle il ne veut pas quitter les environs. √ il écrit un peu de théâtre et de poésie, mais n'a jamais montré ce qu'il fait à qui que ce soit. pourtant, tous ses débuts de projet ont été portés à maturité. il n'a juste pas l'ambition nécessaire pour vouloir percer dans le monde de l'écriture. ce qui le passionne, c'est de jouer.

story of my life
(les lettres sont datées d'automne 2011 jusqu'à fin 2014. la conversation épistolaire n'est — of course — pas exhaustive, et présentée dans l'ordre chronologique. cet ordre n'a rien à voir avec celui des anecdotes.)

Hey you. ♡

J'espère que la vie à Memphis suit tranquillement son cours et que tu n'as pas fait pas trop de bêtises depuis ta dernière lettre. D'ailleurs, t'as vu, je réponds vite. Enfin, ça risque quand même de mettre un peu de temps à voyager, faut lui laisser le temps de prendre l'avion, à ce p'tit bout de papier.

Ici tout va bien. C'est un peu le rush en cuisine, mais je suis accro à ce que je fais, je crois que je ne changerais pour rien au monde. Je crois aussi que j'te le dis dans chaque lettre, mais je ne me lasse pas de le répéter. Le froid tombe, on a même eu quelques flocons ce matin. D'après les gars de la cuisine, va pas y avoir plus de neige que ça, pour le reste de l'hiver ! C'est assez pathétique, mais je m'y fais. Au moins, j'vais pas congeler comme quand on vivait encore à Calgary. D'ailleurs, as-tu des nouvelles de tante Adèle ? Et de Clyde ? Il est toujours en Argentine ? Et le théâtre, t'en es où ? Tu travailles toujours sur La nuit des rois ?

Ci-joint, quelques petites photos de Paris. Je les ai prises la semaine passée en me promenant. C'est le pied, t'as pas idée. ♡

J'espère que tu te portes bien. J't'embrasse sur les deux joues et les deux fesses. Arrête ta grève des bonnets et fais attention à pas attraper froid. ♡

Meg'.

≈
J'ai six ans, et je crie.

J'entends maman qui monte les marches quatre à quatre, mais je sais déjà, au fond de moi, que quoi qu'elle fasse pour tenter de nous séparer, ça ne servira à rien. On a toujours été collés les uns aux autres. On l'était déjà au fond de son ventre. Même si elle enferme Clyde, même si elle donne une gifle à Meg' et la contraint à rester dans sa chambre, même si elle m'emmène à l'autre bout de la maison, rien n'y fera. Elle va essayer, je le sais. Essayer de toute ses forces. Sachant, au fond d'elle, que les inséparables sont impossibles à décoller. Ça n'a pas d'importance. L'urgence, c'est de gérer la crise.

Je continue de crier. J'ai déjà des poumons à cet âge-là. Clyde balance un coup à Megara à l'aveuglette, et continue de gribouiller mon dessin avec fureur, appuyant sur le pauvre papier à l'en percer du bout de son feutre. Meg' a empoigné le premier objet qui lui venait sous la main — une petite poêle de dinette en plastique — et assène des coups répétés dans le dos de mon frère, en hurlant. Mais il n'arrête pas. Il continue de massacrer mon dessin. Continue de se faire massacrer par Megara. Il doit toujours avoir raison. Avec le temps, je devrais avoir appris à ne pas me mêler de leurs disputes, et à m'occuper de mes oignons. Oui mais voilà : les inséparables sont Inséparables. Et si ça les concerne, ça me concerne.

Maman rentre en hurlant et empoigne Megara. Clyde, sentant son heure proche, se redresse, me jette le crayon feutre dans la figure et me pousse brutalement. Lorsque la mine du feutre percute ma joue, j'attrape la petite poêle en plastique tombée à terre, et je la jette sur Clyde. Une main se referme sur le col de mon frère, et nous empêche de continuer à nous battre. Maman est folle de rage. Je crois qu'on va tous être privés de dessert.

Voilà la seule chose à laquelle j'arrive à penser, en continuant de hurler.

≈

Tcho.

J'suis désolé de pas t'avoir écrit plus tôt, j'ai été bien occupé. J'ai trouvé du boulot, mais j'avais déjà sérieusement entamé mes économies. Il a fallu que je travaille comme un dingue pour recoudre le fond de mes poches. Je me suis posé, je louais une chambre, jusqu'ici. Je viens de la quitter pour une auberge de jeunesse. Je vais quitter mon boulot dans deux semaines, et m'envoler pour l'Afrique du Sud. Je te ferai envoyer une peluche éléphant, pour me faire pardonner d'avoir détruit la tienne quand t'était p'tit.

J'te kiffe frangin. Tu m'manques. On essaie de se capter quand j'suis en Afrique du Sud ? Je t'enverrai un mail, ce sera plus simple, et on essaiera de se faire un skype.

J't'embrasse sur les deux fesses.

C.

≈
J'ai dix ans, et j'ai peur.

Clyde s'est déjà fait entraîner par le petit caïd du bac à sable pour aller inventer une éternelle connerie, et Meg' est partie rabaisser les petites princesses qui pensent que les hommes sont des princes charmants. Et moi, je suis seul. Le coeur serré, assis sur le bout d'un banc, dans le coin le plus abrité de la cour de récréation, je regarde les autres enfants jouer. Un match amical de soccer, dans un coin. Des petits groupes de filles qui doivent attraper des garçons. D'autres qui jouent avec un élastique, à sauter et exécuter des chorégraphies minutieuses dont j'ignore tout, en chantant des chansons que je ne comprends pas. Mes oreilles sont cotonneuses. Ma langue est lourde. Quand bien même quelqu'un viendrait me parler, je serais incapable de lui répondre.

Je ne voulais pas partir du Canada. Je voulais rester dans ce pays que je connaissais, dans cette ville que je connaissais, auprès des gens que je connaissais. J'avais un besoin viscéral de cet environnement familier, dont j'avais été cruellement et brutalement délogé. Personne ne m'avait demandé ce que je voulais, à moi. Parce qu'on ne demande pas ça à un gamin de dix ans. Tante Adèle me manque. Elle m'a dit que je la reverrai, et que je pourrai venir à Calgary pendant les vacances. J'ai hâte. Encore cinquante et un jours. Je fais des croix rouges sur mon calendrier. J'ai du mal à croire que « ça va passer vite », comme dit maman.

Les chevilles croisées, le bout des pieds touchant le sol, les mains entortillées sur mes genoux, je jette un rapide regard autour de moi. Personne ne semble me remarquer. Je me tasse contre le dossier du banc, et sors de sous mon blouson le livre que j'avais embarqué en catimini en sortant de la salle de classe. Je suis fatigué d'entendre les cris des autres enfants autour de moi. Progressivement, je m'isole. Le monde disparaît. J'oublie qu'il m'oubliait.

Le Petit Prince ne crie jamais, lui.

≈

Hey you. ♡

Je suis désolée du temps que j'ai mis pour répondre à ta dernière lettre. Je sais à quel point tu aimes la communication épistolaire, je devrais faire un effort. Je ferai un effort. Promis. Mais je pense que pour ce qui est de m'étaler, je t'enverrai un mail dans la semaine. Si ça se trouve tu auras mon mail avant ma lettre. Je m'en excuse d'avance !

Je t'écris entre deux rushs. J'ai une pause de quinze minutes à peine. Je voulais juste te dire que je ne t'oublie pas, mais que je suis submergée, ces derniers temps. Tu sais, la vie, tout ça. Je ne sais pas si Clyde t'a dit, mais il va venir en France pour quelques mois ! Ce serait génial si tu pouvais venir nous rejoindre pour Noël. T'en dis quoi ?

J'dois filer. J't'embrasse sur les deux fesses, et je laisse le soin au commis de cuisine qui a sa pause juste après moi de poster ça ! ♡

Meg'.

≈
J'ai quinze ans, et j'aime.

J'ai arrêté de me demander pourquoi mon cœur battait comme ça lorsque ses lèvres ont effleuré les miennes pour la première fois. Je n'avais jamais ressenti ce genre de chose. Enfin, pas pour un homme, à tout le moins. Je crois que c'était à cause des idées de papa. De celles de la famille, de manière générale. On ne m'avait jamais parlé de l'amour d'un homme pour un autre. Je ne savais pas si on ressentait la même chose. Ce que ça faisait. J'avais tort de me poser toutes ces questions. Il n'y a pas la moindre différence.

Je sais que je l'aime, parce que... Parce que je le sais. C'est comme ça. Son sourire me fait sourire. Et quand je le regarde dans les yeux, j'ai envie de m'y installer. Le seul endroit dans lequel je me sente réellement protégé. Je sais que dès que ses bras me relâcheront, je serai à nouveau perdu dans la jungle de mon quotidien. Je sais que mon coeur battra la chamade chaque fois que mon père ou ma mère me parlera d'une petite amie qui se fait désirer. Je sais que je vais encore avoir la langue lourde lorsque Meg' et Clyde me tanneront pour que j'avoue tout. Pour que je me libère, selon eux. Mais je suis terrifié. Horrifié, même, à tenter d'imaginer la réaction que mon père pourrait avoir. Pourtant, au fond de moi, je sais qu'ils ont raison. Il faut que j'en parle. Ce n'est pas une passade. Et il n'y a qu'un seul moyen de me sentir mieux.

Après tout, je l'aime, et il m'aime. Ce qu'ils diront ne changera rien, alors de quoi dois-je avoir peur ?

≈

Juste une petite note rapide pour joindre au colis. J'espère que ça te plaira, frangin. On skype bientôt, de toute manière. Happy birthday à toi, à moi et à l'autre énergumène !

C.

PS : j'suis désolé de t'annoncer que... Ben, t'es plus le seul à avoir tenté l'expérience avec un homme. J'suis tombé sur un type franchement hot, j'dois avouer, et à force de passer du bon temps amicalement on a passé du bon temps autrement... Y'know what I mean. J'ai bien aimé, j'dois avouer. Je comprends ce que tu peux ressentir. Bref, c'est futile, mais j'avais envie d'partager ça avec toi.

PS 2 : J'ai trouvé un nom pour toi, Meg et moi. Le bon, la brute et le truand ! (avoue, elle est bonne)

PS 3 : bisous sur tes deux p'tites fesses !

≈
J'ai vingt ans, et je pleure.

Tante Adèle me frotte doucement le dos, et je peux sentir sa peine immense comme si elle était mienne. Pourtant, je crois qu'elle n'a rien à voir avec celle que je ressens. Je pleure, et je suis incapable de sécher mes larmes. J'ai l'impression de pleurer depuis des heures déjà, tant j'ai honte. Je lui avais promis que je m'accrocherai, quoi qu'il arrive. Et je n'ai pas tenu bon. Pire, même. J'ai volontairement lâché prise, et sans attendre de glisser au fond du gouffre je m'y suis jeté, corps et âme. Je ne voulais plus rien ressentir ; ou alors, que ce soit suffisant pour que quelqu'un m'entende et m'écoute enfin.

Mon père me regarde simplement de travers. Ma mère a une pitié immense pour moi. Et mon frère et ma soeur sont révoltés. Mais rien n'est arrangé. Dans la bouche de mon père, je suis toujours un être répugnant et abject. Une aberration, qui préfère pratiquer le péché de sodomie plutôt que de s'en tenir aux conventions sexuelles, instaurées pour notre bien-être. Clyde lui aurait ri au nez, si ç'avait été lui le concerné, je le sais. Megara lui aurait collé son poing dans la figure. Mais moi je n'y arrive pas. Moi, je me recroqueville, et je fais comme maintenant ; je pleure. Je me laisse malmener, et j'acquiesce. Oui. Je suis stupide. Je suis répugnant. Je suis désolé.

Je suis désolé de ne pas pouvoir m'en empêcher. J'aime leurs bras, leur chaleur. La douceur de leur peau, et les muscles sculptés précieusement sous mes doigts. J'aime la prise ferme qu'ils exercent sur les corps qu'ils tiennent, et cette sensation d'être une propriété, un objet sacré, lorsqu'ils me gardent contre eux. Je les aime. Je n'y peux rien.

La dépression m'avait emmené à bout. Depuis quatre ans, on me lâchait que j'étais répugnant. Un bon à rien. Pendant quatre ans, j'avais secrètement regretté le jour où, poussé par mes Inséparables, j'avais pris mon courage à deux mains, et avoué mon amour pour Antoine à mes parents. Et au bout de quatre ans, j'ai décidé que je n'en pouvais plus. Que je refusais de continuer à pleurer, toutes les nuits, au fond de mon lit. Que je n'étais plus capable d'endurer la moindre parole rabaissante. Que je n'avais plus le courage de tenter de reprendre confiance en moi. Je voulais que tout s'arrête. Et même ça, je n'avais pas réussi à le faire.

C'est mon frère et ma soeur qui m'ont trouvé. J'avais vidé la boîte d'antidépresseurs que mon médecin me prescrivait depuis mes seize ans, avec le fond de la bouteille de rhum que mon père gardait si précieusement. Je m'en suis sorti. Une psy a fait sortir mon père de ma chambre en s'apercevant de l'état de stress qu'il me causait. Mon frère et ma soeur ont appelé tante Adèle, sans me prévenir, pour qu'elle vienne me rendre visite. Et si je suis parvenu à retenir mes larmes tout ce temps, j'ai cessé de me contrôler lorsqu'elle a passé le pas de la porte. Les sillons humides ont creusé mes joues, et mes sanglots ont éclaté dans la microscopique chambre blanche. Et depuis, murmurant que je veux sortir de là, je pleure.

À bout.
Au bout.
Mais debout.

≈

Hey, baby.

J'voulais te dire à quel point je suis désolé pour tante Adèle. Maman m'a appelée pour me le dire hier soir. J'ai tout de suite pensé à toi. Je sais que vous étiez super proches, même si ça s'était un peu effiloché ces dernières années, ça doit être dur. J'te soutiens, frangin. Tu sais bien que c'est pas la distance qui va nous séparer. Si tu veux parler, n'hésite pas à m'appeler. Je suis déjà suffisamment désolée de ne pas pouvoir être là pour les funérailles... Tu embrasseras tout le monde pour moi ?

Sur une note plus joyeuse... J'ai rencontré quelqu'un, baby boy. Ça fait un mois qu'on est ensemble, j'ai complètement oublié de t'en parler. Je t'avoue que je suis dans le rouge, ces derniers temps. Mais j'ai eu une promotion, j'devrais bosser dans un quatre étoiles à partir de la saison prochaine ! J'ai tellement hâte.

Compte-rendu plus long par mail la semaine prochaine !

Bisous sur tes deux fesses. ♡

Meg'.

≈
J'ai vingt-trois ans, et je tremble.

J'ai souvent souhaité qu'il paie pour ses crimes, paie pour ses coups. Je me suis souvent vu les lui rendant, appliquer le proverbe « qui sème le vent récolte la tempête » sans ciller. J'en ai toujours rêvé.

Mais je ne voulais pas ça.

Je tremble. J'ai l'impression d'être assis sur cette petite chaise grinçante du poste de police depuis une éternité ou deux. Debout derrière le comptoir, la standardiste-secrétaire filtre les appels en me fixant, depuis au moins une dizaine de minutes. Je me demande à quel point j'ai l'air mal à l'aise, dans cet endroit. Les larmes ont commencé à sécher sur les joues de ma mère. Elle finit par se lever, me glisser quelques mots, et s'éloigner. Elle va aller se remaquiller, pour passer le temps. Et pour avoir l'air un peu plus confiante, très certainement.

Un commissaire de police fume une cigarette à l'extérieur, devant l'entrée principale du commissariat. Je l'observe, de dos, quelques secondes. Mes mains tremblent. Je tente de serrer le plus fermement possible les rebords métalliques de ma chaise, mais impossible de contenir les spasmes dans mes doigts. Une part de moi sent le malaise de Clyde et Megara. Un et un et un font trois. Deux sont en mauvaise posture. Pour moi. Et moi, j'attends.

Ç'a commencé hier après-midi, quand j'ai fui de chez moi pour me rendre à une répétition. Clyde mixait dans sa chambre, et n'entendait rien. Meg' revenait d'une sortie avec un ami, et elle m'a croisé dans l'entrée. Elle a vu la marque sur ma joue, celle sur mon poignet, et la légère trace bleutée dans mon cou. Elle a voulu des explications qu'elle n'avait pas besoin d'entendre, et qu'au fond d'elle elle connaissait déjà. Depuis quelque temps, j'avais tenté de commencer à assumer que je pouvais aimer les hommes aussi bien que les femmes — voire encore mieux. Mon père s'était abaissé à une méthode abjecte pour tenter de me faire entendre raison. Ç'a commencé par des baffes. Puis je tentai de le fuir. Et les sanctions avaient empiré. Et l'éducation par la peur fonctionnait.

Meg' avait tenté de me retenir, mais j'avais détalé. Si j'avais bien compris, d'après la police, elle était allée chercher mon frère en haut et lui avait raconté l'état dans lequel je me trouvais. Tous deux étaient allés voir mon père. Mettre les choses au clair. Mon paternel s'était emporté. Il avait voulu frapper Clyde, qui avait esquivé le coup, et l'avait laissé perdre son équilibre, et heurter le plan de travail. Puis mon père s'était effondré. Le plus simplement au monde, sans qu'aucun des deux ne comprennent pourquoi. Il était mort avant d'arriver à l'hôpital, et n'était pas revenu lors des réanimations. Les médecins avaient confirmé l'arrêt cardiaque. Les interrogatoires de Megara et Clyde n'étaient que pure formalité. Il ne fallait pas s'inquiéter. Mais j'étais terrifié.

Je sens une larme tenter de percer, s'élancer vers l'arête de mon nez. Je l'écrase du bout de mon doigt, avec précipitation. Je ne veux pas pleurer. Pas là. Pas maintenant. Le drame vient de nous frapper, et je dois rester fort.

Je sais qu'une part de mon cauchemar vient de prendre fin. Je vais pouvoir essayer de me reconstruire, sans poids accroché à la cheville, sans menace de me prendre une volée si je suis aperçu un tout petit peu trop proche d'un homme.

Je déglutis péniblement, et je respire à pleins poumons l'air renfermé du commissariat. Mon regard se fixe sur mes doigts oscillants.

Et je tremble, de la culpabilité d'être soulagé.

≈

Tiens, v'la la madame éléphant en peluche pour aller avec le monsieur éléphant en peluche que j't'ai offert y a deux ans. J'crois que j'vais m'établir en Afrique du Sud. J'm'y sens bien.

C.

≈
J'ai vingt-sept ans, et je souris.

Le paquet est arrivé ce matin. La peluche de l'éléphante est posée contre ma jambe, tandis que j'accroche la lettre dans le petit album-inventaire de ma conversation épistolaire avec Clyde. Je relis la note une dernière fois avant de le ranger. Mes doigts caressent distraitement la tête de la peluche. Elle n'est pas très douce. Mais ça m'est égal. L'intention y est, malgré les goûts éternellement douteux de mon frère. Peut-être un jour cessera-t-il de m'envoyer des peluches en guise de souvenir. Ma chambre va finir par déborder.

J'entends la porte d'entrée qui s'ouvre, au loin. Violet qui lâche un grognement. Je crois qu'Hamlet a encore élu domicile sur un foulard qu'elle a laissé traîner. Ses cris énergiques me font sortir de mon trou. Elle tient son foulard réduit en charpie, et tente de faire fuir le petit animal qui la regarde, imperturbable. Je ne peux pas m'empêcher de sourire. De ces sourires doux mais sincères qu'elle me tire si facilement depuis qu'elle a emménagé dans cet appartement. Elle cherchait un colocataire, et j'avais besoin de me soulager du poids d'un demi-loyer. On n'a pas cherché à savoir si on s'entendrait ou non. Elle a inspecté ma bibliothèque, mon étagère à CDs, et elle a décidé qu'elle emménageait. Elle connaissait mon nom, mes goûts, et cela lui semblait amplement suffisant. Le reste, elle l'a appris plus tard. Ça n'a jamais eu l'air de la gêner.

« C'est pas Hamlet qu'il fallait l'appeler, ce truc, c'est Tywin Lannister. Dès que j'ai commencé à l'engueuler il a décidé de se faire les griffes sur mon foulard pour s'venger ! »

Malgré mes efforts pour rester sérieux et afficher un air tout ce qu'il y a de plus désolé, je ne peux pas empêcher mes lèvres de s'étirer encore un peu plus, en un large sourire compulsif.

« J't'en repayerai un. Promis. »
« Mon anniversaire c'est dans un mois, n'oublie pas ! »

Elle jette le foulard par terre, traverse le salon et claque la porte de sa chambre derrière elle. Aussitôt disparue, Hamlet retourne se rouler en boule sur le morceau de tissu.

Je retourne dans ma chambre, ferme derrière moi et prends la petite éléphante en peluche dans mes bras. Je la regarde dans les yeux, quelques instants, avant de la reposer sur l'oreiller d'à côté. Je continue de la fixer, pensif.

Au fond, la vie n'est pas parfaite. Mais le plus gros pied de nez qu'on puisse lui faire, c'est continuer de lui sourire.

all the single lady
ton pseudo : elephant song. √ âge : vingt ans. √ pays : fuseau horaire québécois, mais mon coeur reste français.    √ fréquence de connexion : connexion, tous les jours, j'suis une geek sur les bords quand même. rp, sûrement pas autant, j'ai une vie, mine de rien.    √ comment t'es arrivé ici? : parce que ma coloc' est folle et s'est ramenée et voilà, ça m'a donné envie, et j'ai envie de jouer nicolaus depuis quelques jours, donc je vous envahis.    √ un commentaire? : j'ai envie de dire une bêtise, mais j'ai aucune bêtise qui me vient.   alors je me contenterai d'un ultime smiley parce que j'aime les smileys : (note : la citation de mon titre est d'oscar wilde. celle de ma fiche est de victor hugo.   )

cette plume que tu as, ça m'a bouleversée. excellente fiche, je ne peux pas dire mieux.

Pour débuter ta vie dans le forum, il ne faut pas oublier de remplir correctement ton profil. C'est très important de venir recenser ton avatar pour ne pas qu'une autre personne tente avec la même tête que toi. Pense à venir demander un logement si tu ne veux pas dormir dans la rue. Il faut en profiter pour jeter un coup d'oeil au reste des demandes. Tu peux passer par le speed dating si tu souhaite que le pnj te trouve une idée de rp avec un des membres. Maintenant que tu as fait toutes ces étapes ennuyeuses, nous t'invitons à te créer ta fiche de lien et à la compléter le plus vite possible. Il y a une fiche de lien à votre disposition, pour suivre les couleurs du forum et pour vos fiche tentez de ne pas déformer le forum avec vos fiche, c'est un maximum de 430px. Juste un petit rappel pour les posts rp, si vous mettez des cadre et tout, veuillez à ce que cela ne dépasse pas 430px en largeur, pour ne pas déformer le forum. merci. Une fiche a été construit pour vous ici : fiche pour les posts rp . Et surtout. Have fun.