On a souvent tendance à croire que le passé est passé. Qu’on ne le reverra plus jamais. Comme s’il était inscrit sur une ardoise magique et qu’on l’avait effacé. On croit aussi qu’avec les années, on a passé à la trappe ses erreurs de jeunesse, ses amours de pacotille, ses échecs, ses lâchetés, ses mensonges, ses petits arrangements, ses forfaitures. On se dit qu’on a bien tout balayé. Le passé d'Andrew venait tout juste d'emboutir le présent. Silley est revenu dans sa vie, quelques instants seulement mais elle a réussit à tout chambouler dans son esprit. Parce que dans le fond, il ne l'avait jamais vraiment oublié. Il l'avait juste mise dans un coin de son cœur, feignant chaque jour. Quelle connerie il avait fait, seulement, elle lui avait tellement manqué toutes ses années. Alors le voilà, devant sa quatrième bière de la soirée, prit de remords parce qu'il sait que Juliette ne mérite pas ça. C'est un excellente petite amie, douce, gentille, attentionnée, elle a su apporter à Andrew ce qu'il manquait dans sa relation avec Silley : l'amour simple, la bonté, la joie incommensurable de se laisser aller sans réfléchir dans les bras de l'autre. Seulement c'est plus fort que lui avec Silley, cette attraction, ce désir qu'il ressent pour elle le torture chaque jour, il en est fou amoureux, il l'a toujours été et le sera sans doutes jamais.

Ce baiser ne sort d'ailleurs plus de son esprit, pendant les quelques minutes passés avec elle, il en avait presque oublié Juliette. C'est affreux de dire un truc pareil, surtout qu'il ne veut pas lui faire du mal, Juliette, il veut la protéger des aléas de la vie, elle est trop fragile pour qu'il la blesse, il n'a jamais été aussi tendre qu'avec elle. Mais plus sa vie avance et plus Andrew se dit qu'il ne choisit pas grand chose dans la vie, ce qui doit arriver arrivera. Il paye son addition et rentre enfin chez lui. Il a menti à Juliette en lui disant que ses horaires avant été prolongés un peu, au lieu de ça, il était aller boire en solitaire dans un bar, c'est bien triste. Il passe la porte de chez lui, un chewing gum dans la bouche et passe une main dans ses cheveux pour les remettre en place. Il a mal à l'estomac, une peur semblable à celle des enfants qui craignent de faire un cauchemar et redoutent le noir. Il a peur qu'elle ne découvre le pot aux roses et le quitte, parce que même s'il se comporte comme le dernier des enculés, il aime sa fiancé. Y'a quelqu'un ? fit il d'une voix rauque qui résonne dans les murs de la maison. La voix de sa chérie se fait vite entendre pour lui signaler qu'elle est dans la cuisine. Il pose ses affaires sur le porte manteau et la rejoint. Un baiser sur ses lèvres. Il n'arrête pas de repenser à celui qu'il a partagé avec son ex petite amie, c'est dingue. Peut on aimer deux femmes en même temps ? Il baisse la tête, il se demande s'il ne devrait pas tout avouer à sa petite amie, lui expliquer mais lui dire quoi, lui même ne sait pas vraiment ce que cela représentait...

Le bonheur était là, à portée de main, sous mon nez. Je ne pouvais pas me plaindre d'avoir une vie misérable ou d'être malheureuse. Au contraire. J'étais tout sauf malheureuse surtout en ce moment. Mon mariage arrivait l'été prochain, j'avais le plus merveilleux des fiancés. Après avoir reçu son appel comme quoi il devait travailler un peu plus longtemps ce soir, je pensais que ce serait donc une bonne occasion pour lui faire un bon petit repas une fois qu'il serait rentré, pour le conforter. Il travaillait si dur, un bon petit repas et sa future femme à son service, ne craquerait-il pas ? Toute heureuse à l'idée de faire plaisir à mon homme, je commençais la cuisine. Tout en mettant la main à la pâte je ne pouvais m'empêcher de penser à quel point je devais être chanceuse d'être avec lui. Pourtant cela n’effaçait pas mes craintes. En ce moment je le trouvais très.. étrange, un peu plus distant et je préférais me consoler en me disant que c'était le boulot un peu trop chargé. Andrew était mon premier et sûrement mon dernier amour si notre mariage allait jusqu'au bout. Toute ma vie je m'étais préservée pour ne pas tomber sur des profiteurs. J'aurais pu avoir n'importe quel homme, de n'importe quelle classe sociale étant donné les relations que mon père entretenait à Louisville. Cependant j'avais lâché pour mon dévolu pour Andrew Ashcroft. Bientôt je serais madame Ashcroft. Cette idée tellement mielleuse me fit presque oublier le repas que j'avais mis sur le feu. C'est à ce moment que j'entendais quelqu'un rentrer, ça devait sûrement être lui. "Je suis là." Souriante, j'accueillais mon amoureux en lui offrant un baiser de bienvenue. Et en le voyant baisser la tête dès notre baiser terminé, je comprenais tout de suite que quelque chose n'allait pas. " Tu vas bien ?" demandais-je inquiète. Peut-être croyait-il que je ne découvrirais rien, mais je le connaissais bien à présent et je savais quand il était gêné. Pourtant, par peur de ne le perdre et de faire éclater une dispute inutile, il y avait bon nombres de réflexions que je gardais pour moi afin de ne pas l'irriter. "Tu as vraiment pas l'air dans ton assiette.. Bon en tout cas, je t'ai préparé un petit truc à manger, rien que pour toi. Tu as faim?" Je m'efforçais de sourire tout en regardant un Andrew pas normal.

Juliette, il l'a rencontré il y a un peu plus de trois ans, un rapport medecin patient chaleureux et même s'il l'avait trouvé jolie, jamais il n'aurait imaginé un jour ils en seraient là aujourd'hui : fiancés. Il aime Juliette, sincèrement, seulement sa demande en mariage était trop précipité, il aurait du y réfléchir à deux fois, il aurait du fermer la porte avec Silley avant de lui proposer un engagement à vie. Et maintenant, le voilà comme un con avec une porte plus qu'ouverte du côté de son ex petite amie et une future femme, folle de lui qu'il a peur d'abimer. Partagé entre deux femmes, le voilà bien incapable de faire un choix... Enfin, il se doute que Silley fera ce choix pour lui en l'envoyant paitre ailleurs. En fait, c'est le dilemme biblique de nefertiti entre moise et ramses : que choisir entre la jouissance d'un bonheur simple, tendre et la passion folle qui le détruira sans doutes jusqu'à la fin de ses jours. Je suis là.  Il s'avance dans la cuisine où elle s'affaire à préparer le repas de ce soir. Elle est belle, souriante, dynamique et elle l'aime, que demander de plus franchement ? Il serait vraiment un gros con si il passait à côté de ça. S'il la troquait contre une relation qui lui fait trop de mal pour être saine et pourtant il y songe. Son visage est pâle, son haleine empeste l'alcool. Tu vas bien ? Il baisse la tête. Tu as vraiment pas l'air dans ton assiette.. Bon en tout cas, je t'ai préparé un petit truc à manger, rien que pour toi. Tu as faim? J'ai déjà mangé. répond t-il, désagréable. C'est quand même énorme sur ce coup là, il se montre terrible avec elle alors qu'elle fait tout pour lui faire plaisir, s'il est aussi chiant, c'est parce qu'il a embrasser Silley et que ça le perturbe et au lieu d'agir comme n'importe quel mec en oubliant ça, voir en l'avouant, puisque vous connaissez le diction, faute avouée à demi pardonné. Et ben non, lui il s'en prend à elle. Il pousse un soupire et se reprend : J'ai eu une rude journée, je suis épuisée... Une manière de s'excuser face à elle, pour cette maladresse, pour ce qu'il a fait... La vérité, c'est qu'il est complètement flippé, toute sa petite vie tranquille vient de foutre le camps en une fraction de seconde. Il vient alors s'installer juste derrière elle et il met ses mains sur ses hanches. Ils ne se sont pas vu depuis la veille, à vrai dire, entre les préparatifs du mariage, son boulot, ils ne se voient pas tant que ça ces derniers temps, ils ont sans doutes besoin de se retrouver, ça ne peut être que ça.

A peine était il rentré qu'il était désagréable et de mauvaise humeur. Je n'aimais pas les conflits avec Andrew car véritable rancunière et tête de mule que j'étais, il me fallait souvent du temps avant de pardonner les erreurs de mon conjoint. Même s'il était tout ce qui m'était arrivé de mieux depuis toujours. Il avait su faire mon bonheur et savait être patient pour moi. Pourtant n'étais-je pas un peu trop égoïste ? Je faisais toujours passer le saint bonheur d'Andrew avant le mien, comme si ma vie dépendait de lui. C'était très flatteur pour lui mais moi dans l'histoire que gagnais-je réellement ? C'était ce genre de questions qui brouillaient mon esprit. Andrew avait connu des femmes avant moi, il connaissait déjà l'amour et l'affection qu'il devait porter à une femme. Moi je n'avais jamais connu d'histoires d'amour, je n'étais jamais sortie avec quelqu'un, c'était mal ? "J'ai déjà mangé." Réponse froide et brute. Je restais perplexe face à sa réponse. Mécontente, je lâchais ce que j'avais dans la main et lui tournais le dos. Heureusement il se reprenait comprenant son erreur. "J'ai eu une rude journée, je suis épuisé..." Je souriais faiblement et acceptais sa semi-excuse. Comprenant que j'étais irritée face à sa réaction, il vint se mettre derrière moi et posa ses mains sur mes hanches. Un frisson me parcourait. Ca faisait si longtemps qu'il ne m'avait pas fait ça. Je soupirais et me retournais face à lui, passant mes bras autour de son cou. " Je te comprends, le boulot doit être lourd pour toi. Tu devrais te reposer davantage. Moi aussi au cabinet y a pas ma de travail, c'est épuisant." Je lui souriais et lui volais un baiser furtif. Ses lèvres, sa présence, ses bras autour de moi.. j'avais l'impression que ça faisait une éternité. Songeuse face à un Andrew mal à l'aise, je laissais échapper une réflexion qui allait sûrement déclencher une dispute mais j'avais besoin d'avoir le coeur net sur certaines choses. "Tu sais.. j'ai l'impression qu'on s'éloigne plus qu'on se rapproche en ce moment. Tu m'as fais ta demande, notre mariage se prépare, mais tu as l'air secoué par la nouvelle. Tu ne veux plus te marier avec moi ? Si c'est ça on a tout notre temps, je te jure, tu peux enlever ta demande. Si tu n'es pas prêt je comprendrais. Le temps. Le temps !! Tu me répètes souvent qu'avec le temps ça ira mieux, mais on est même pas encore marié que tu es froid, distant et désagréable. Qu'est-ce qu'il t'arrive pour de vrai ? Andrew ? Peut-être que je suis trop parano alors, oui disons que le problème c'est moi. Ca ne peut être que ça." je me dégageais de l'emprise de l'homme de ma vie, j'avais besoin de me remettre les idées en place, j'étais peut-être partie un peu trop loin..

Quel sale con, elle se démène pour être une petite amie hors du commun, proche de la perfection à vrai dire et lui agit vraiment comme le dernier des crétins. Silley fait toujours cet effet au brun, elle le rend plus noir, plus sombre, plus mesquin, tout ce qu'il y a de plus mauvais en lui en gros. Elle se tourne vers lui, passant ses mains autour de son cou, il esquisse un sourire. Je te comprends, le boulot doit être lourd pour toi. Tu devrais te reposer davantage. Moi aussi au cabinet y a pas ma de travail, c'est épuisant. Il s'en veut de lui avoir dit ça, il n'est pas tout seul à bosser et même si ces gardes sont parfois longues, il n'est en général pas aussi râleur lorsqu'il rentre chez lui. Elle est avocate et son travail aussi lui prend pas mal de temps, surtout qu'elle est très compétente. Elle l'embrasse et il ferme les yeux, ses mains toujours sur sa taille se défilent et son doigt trempe dans la préparation culinaire de la belle blonde avant de le porter à sa bouche. Il se tourne alors de nouveau vers sa petite amie, l'air grave. Tu sais.. j'ai l'impression qu'on s'éloigne plus qu'on se rapproche en ce moment. Tu m'as fais ta demande, notre mariage se prépare, mais tu as l'air secoué par la nouvelle. Tu ne veux plus te marier avec moi ? Si c'est ça on a tout notre temps, je te jure, tu peux enlever ta demande. Si tu n'es pas prêt je comprendrais. Le temps. Le temps !! Tu me répètes souvent qu'avec le temps ça ira mieux, mais on est même pas encore marié que tu es froid, distant et désagréable. Qu'est-ce qu'il t'arrive pour de vrai ? Andrew ? Peut-être que je suis trop parano alors, oui disons que le problème c'est moi. Ca ne peut être que ça. Il passe une main dans le brun de sa crinière, ces cheveux sont longs, un peu trop, il devrait prendre le temps de les couper. Je suis juste fatiguée Juliette. Une journée compliqué, un cas de récidive. Oh oui, une grosse récidive même, un baiser trop intense pour que le jeune homme soit intact. Il pourrait se confier, lui dire ce qu'il en est mais comment lui parler d'un truc qu'il ne comprend pas vraiment lui même, son passé est revenu dans sa vie et sans qu'il puisse ne rien y faire, parce que face à Silley, tout lui échappe, il ne contrôle absolument rien. Il pensait cette partie de sa vie entièrement révolue et pourtant, vu l'intensité de ce qu'il a ressentie, il faut se rendre à l'évidence, ce n'est pas finit pour lui... Je t'aime... Parce ce que c'est la seule vérité qu'il peut lui avouer pour le moment. Elle passe une main caressante sur le visage de la blonde.